Page:Côté - Bleu, blanc, rouge, 1903.djvu/22

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point de divergence entre deux rayons partis identiques de la voûte céleste, mais qu’un accident divise en touchant terre, mettant l’infini entre eux. Cet accident c’est le fanatisme, une conception étroite du patriotisme, laquelle aurait pour effet de nous affaiblir encore en divisant nos forces. Il a fallu ce déluge de sang, qui a inondé la France pour teindre de rouge le drapeau des croisés. Le tricolore est sorti tout armé du sein de la France, comme Minerve du cerveau de Jupiter ; mais depuis de longs siècles, on l’attendait avec impatience. Quand il parut, tous accueillirent, avec un long cri d’amour, cet enfant du Miracle dont le premier cri fut un appel à la liberté. Ce cher drapeau, tout lacéré, on voudrait le reléguer aux oubliettes et nous imposer une coquette bannière, pimpante et dorée, avec l’étiquette de la célèbre maison X… Et nous forcer à l’embrasser à genoux !… Allez donc demander à ce jeune homme, qui garde comme une relique le vieux bonnet de sa mère, s’il voudrait l’échanger contre un merveilleux bonnet en fine dentelle. Le regard indigné qu’il vous décocherait, vous ferait comprendre ce qu’on peut manquer de sentiments délicats à notre égard, en nous demandant de substituer au tricolore le drapeau d’un de ces novateurs, ce qui serait plus qu’un manque de goût, mais une honteuse idolâtrie. Ah ! l’on compte sans le peuple, qui ne sera jamais complice d’une vilenie, car il a gardé, lui, le culte du tricolore.

Ô drapeau chéri, c’est à genoux que je fais amende honorable pour tous ces ingrats qui oublient que tu conduisis nos martyrs au triomphe de notre nationalité sur ses maîtres ! Ah ! que ne puis-je, comme ces braves, rendre mon dernier soupir sous ton ombre ! Plus heureux que moi, ils dorment, eux, en-