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PAPINEAU

SON INFLUENCE
SUR LA PENSÉE CANADIENNE


CHAPITRE I

GENÈSE DE LA RÉVOLUTION


M. Chapais, dans son intéressante histoire du régime anglais, glisse — oh ! avec quelle légèreté — sur les exactions des vainqueurs, pour amener naturellement les conservateurs à penser que l’insurrection de 37 ne fut pas justifiée par les événements ; comme si c’était dans l’ordre que l’on se révoltât quand tout marche à souhait.

Le caractère du Canadien-français n’est pas à base de salpêtre ; on ne fera croire qu’à ceux qui ont intérêt à se gober et à se faire gober qu’un peuple aussi sensé, aussi pondéré que le nôtre ait pris les armes sans raison, et quelles armes ? celles qui rouillaient dans les greniers : vieux fusils détraqués, pour combattre ces beaux soldats rouges qui possédaient force munitions, baïonnettes, sabres, fusils et canons.

La hardiesse du geste témoigne de leur exaspération. Sans préparation, sans argent, des paysans, des bourgeois, d’habitude peu fringants, s’attaquent à une puissance formidable qui n’a déjà fait qu’une bouchée des Acadiens et qui entend bien ne pas se faire chiper le Canada comme les États-Unis. Les braves, que tout d’avance condamne, ne s’engagent pas ainsi dans une partie désespérée s’ils ne sont persuadés que leur vie ne vaut pas la peine d’être vécue. Quand on va à la mort si allègrement et sans y être contraint, c’est que l’existence est insupportable.