pes anglaises se dirigeaient de leur côté, après avoir triomphé à Saint-Charles, il tenta de dissuader Chénier de ses projets de résistance. Mais ce dernier demeurait inébranlable :
— Je suis déterminé à mourir les armes à la main, plutôt que de me rendre. Autant vaudrait essayer de prendre la lune avec ses dents, que de chercher à ébranler ma résolution.
Le curé Paquin — selon le propre journal qu’il fit des événements pendant que l’ennemi bombardait son église — décida de faire connaître aux autorités les dispositions actuelles des habitants pour prévenir des désordres inévitables si l’on en venait à une bataille. Dans ce but, il résolut d’aller à Montréal, mais Chénier lui coupa toutes les issues. Il avait planté des sentinelles partout, et personne ne pouvait passer outre, sans un permis de sa main. Le curé sollicita du commandant un sauf-conduit qui lui fut refusé. Le docteur se rendit au presbytère, son épée à la main, pour ponctuer ses déclarations de moulinets énergiques.
— Vous êtes fou de vouloir engager vos concitoyens dans cette lutte désespérée. Vous allez attirer tous les malheurs sur notre village. Il sera incendié comme ceux de Saint-Charles et de Saint-Denis. Je vous accuse devant Dieu et devant les hommes de tous les malheurs à venir.
— C’est vous, monsieur le curé, que j’accuse à mon tour, vous nous avez nui extraordinairement ! Vous êtes la cause du refroidissement de la paroisse. Vous devriez être à notre tête quand nous irons combattre pour nous donner l’absolution.
— Nous, faire une semblable action ! Non, jamais ! Ne l’espérez pas. Ce serait agir contre notre propre conscience, contre les décisions de l’Église, contre les intérêts du gouvernement et du pays. Cette absolution vous damnerait en nous perdant nous-mêmes…
— Eh bien ! puisqu’il n’y a personne d’assez brave pour vous arrêter, je le ferai, moi.
Mais le curé dut renoncer à son voyage à Montréal.
Pendant ce temps les troupes anglaises marchaient sur Saint-Eustache, « Messire » Chartier, curé de Saint-Benoît