Page:Côté - Papineau, son influence sur la pensée canadienne, 1924.djvu/40

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
25
O’Connell et Papineau

avec l’Irlande, c’est que la révolution y bat son plein. Les « demoiselles à pompons rouges », don de l’Amérique sournoise et de l’Allemagne d’hier, ont une éloquence supérieure à celle des plus éloquents démagogues de la rutilante Émeraude.

Daniel O’Connell avait déjà dit : « Un plus grand crime n’a jamais été commis que cet acte de la législation britannique qui ôta à la Chambre des Représentants du Canada le contrôle de la bourse du peuple. » Un plus grand crime avait été commis, c’est celui de la mainmise exercée sur les consciences et les esprits des Canadiens-français, il a suffi à justifier la révolution.

Comment O’Connell peut-il reprocher aux révolutionnaires d’avoir tenté d’escamoter les miliciens canadiens, comme si les insurgés ne commençaient pas par mettre l’armée dans leur manche pour arriver au but qu’ils se proposent. Quelles sont ces méchancetés commises par Papineau et les siens ? Ils ont pillé des magasins de munitions et des maisons de provisions, mais l’état de guerre autorise la rapine, la cruauté, les profanations, voire la débauche et le viol, c’est le déchaînement de toutes les passions. Est-ce que les États-Unis ou la Suisse ont obtenu leur indépendance par des moyens constitutionnels ? Les peuples, même les plus civilisés, n’en sont pas rendus à écouter les raisons des plus faibles. Les forts ne deviennent conciliants que s’ils se sentent chauffés de près. Les Boers n’ont jamais pu convaincre ceux qui convoitaient leurs millions de la justice de leur cause. C’est bien triste à constater, mais toutes les finesses de la diplomatie et les arguments des plénipotentiaires apportent moins de clarté dans une discussion économique que cent mille sabres au clair et deux cent mille baïonnettes.

Il faut prendre le monde tel qu’il est.

Le temps était ou jamais de faire ici un coup d’état. Le fruit semblait mûr, il ne gagnait rien à rester sur la branche. Le triomphe n’est pas infailliblement du côté du nombre, mais les Canadiens-français qui formaient les 7/8 de la population pouvaient sans miracle réduire le huitième qui se composait de parasites, écume des trottoirs de Londres, soldats d’aventure