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Page:Côté - Papineau, son influence sur la pensée canadienne, 1924.djvu/87

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Papineau

cinq ou six cents lieues. Cette saillie ne laissa pas que de m’embarrasser. Pourquoi, disaient-ils, Dieu qui peut conduire aisément les hommes à la félicité éternelle en récompensant le mérite et la vertu, ne prend-il pas cette voie abrégée, pourquoi mène-t-il un juste par le chemin de la douleur au but de sa béatitude éternelle ? »

Si les Indiens ne s’étaient guère laissé pénétrer par la foi chrétienne, par contre leurs superstitions et leurs coutumes s’étaient greffées sur la religion. Pendant longtemps, la chasse-galerie s’est baladée dans l’espace. Jusqu’en 1815, on entendait à époque fixe un grand cri se répercuter de Saint-Jean Nouveau-Brunswick à la Nouvelle-Écosse, c’étaient les cris désespérés des Acadiens morts de chagrin d’avoir été arrachés de leur pays natal.

Brûlés par l’alcool et intoxiqués par la nicotine, minés par la tuberculose, comme les pins et les cèdres de la forêt, notre dure civilisation les a tués. Refoulés de plus en plus loin en des réserves qu’ils tiennent de la philanthropie anglo-saxonne, ils auront disparu de l’Amérique britannique dans cent ans, sans qu’on ait su s’ils mouraient en leur aurore ou à leur déclin.

Le gouvernement magnanime paie une rente aux indiennes qui portent sur leur tête la cape de laine aux bords bariolés, où elles cachent leur figure honteuse. À la fonte des neiges, quand les érables ont commencé à couler, on les voit au marché Bonsecours, dans les gares, offrir en vente des mocassins, des coussinets à épingles perlés, violemment coloriés, du sucre du pays de la couleur de leur peau dorée par le soleil et la neige. Elles n’implorent plus le « guerrier blanc » qui les regarde aujourd’hui comme un objet de musée, une sorte de momie ambulante qui a perdu ses bandelettes.