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Mœurs et esprit des Canadiens


CHAPITRE IX.

MŒURS ET ESPRIT DES CANADIENS.


Un correspondant du Spectateur canadien parle ainsi des charlatans du commencement du siècle : « Vous traitez indistinctement de charlatan tout homme qui soigne sans licence. Mais que le public nous juge. Lequel est préférable des deux, d’un homme qui vous tue dans toutes les formes et muni pour cela d’un diplôme authentique, ou bien de celui qui sans une permission expresse de Sa Majesté vous rappelle des portes de la mort ?… Or, je vous demande si, au meilleur de votre connaissance, parmi ces gens qui s’enorgueillissent si fort d’une licence obtenue quelque fois par charité ou par protection, il n’y a pas un grand nombre de charlatans ? »

Ce bonhomme doit avoir raison un peu, puisqu’il n’y avait pas alors d’école de médecine et que c’était l’administrateur de la province qui accordait les diplômes d’une manière assez fantaisiste, à tout « clerc-docteur » qui avait fait un stage chez un médecin, souvent pour ouvrir la porte, prendre soin des enfants et faire les commissions de la maîtresse de céans. Si son maître avait de l’influence, il obtenait un bout de parchemin qui lui donnait le droit de tuer ses semblables… Il en était ainsi pour toutes les autres professions. Ceux qui avaient du toupet et des amis haut placés s’improvisaient avocats et notaires. Les sages-femmes et les « ramancheux » reléguaient les médecins dans l’ombre. Les sorciers et les jeteurs de sort, les quêteux, les tireurs de cartes étaient des personnages craints et respectés. Les conteurs dans les veillées, comme les violoneux, occupaient