Aller au contenu

Page:Côté - Papineau, son influence sur la pensée canadienne, 1924.djvu/91

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
76
Papineau

rassa, on votait pour Laurier, mais la victoire restera au premier, car un jour ou l’autre on déterrera ses discours pour tuer la prochaine tentative de coopération aux guerres européennes. Son triomphe n’est qu’ajourné.

Notre paysan n’est pas loquace, mais tout coup de langue porte. Il a un esprit direct et précis qui va droit au but. L’orateur politique redoute plus ses interpellations que celles de son adversaire ou des députés ses collègues.

Nous avons vu la mentalité de notre population les années de la révolution et celles qui précédèrent. Nous savons de quel bois se chauffaient ces révolutionnaires qui n’étaient pas des rouges bien que leur drapeau blanc dût se rougir plus tard de taches de sang. C’étaient de bons vivants qui aiment à rire à leurs heures. Le mouvement insurrectionnel se fit à froid, dans le sens qu’il ne fut pas accompagné de bacchanales comme ailleurs. La cruche de whiskey circulait assez allègrement, juste assez pour se donner du montant et pour braver les rigueurs du climat. Avant de faire feu sur les Anglais, ils les criblèrent de traits spirituels, de saillies amusantes auxquelles ils ne pouvaient pas répondre, bien souvent. Lord Bathurst reçut un jour une lettre anonyme, laquelle, étrange coïncidence, ridiculisait à peu près dans les mêmes termes que le Canadien, la goinfrerie insatiable des Anglais qui se payaient toutes sinécures possibles et impossibles.

Cher monsieur,

La bonne histoire que voici m’a été racontée. Une monsieur traverse d’Oswego à York (Toronto). À son arrivée à la petite capitale, il s’enquiert de la douane, ayant des marchandises à déclarer. On lui a montré l’endroit tout près du quai. Le percepteur est un homme aimable, homme d’affaires aussi, très versé dans les chiffres, c’est, M. William Allan. En ouvrant ses malles, M. Z. trouve des lettres qu’il lui faut mettre à la poste à York. Il s’informe où trouver le bureau de poste, et dans le directeur reconnaît… M. William Allan. Ayant aussi des billets à faire escompter, il les fait endosser et part