Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/160

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73 D’ailleurs, une étincelle suffit pour allumer un incendie, et la coupe du crime ne déborde qu’à la dernière goutte. Une révolution profonde peut surgir d’une émeute éclose à temps. Il est difficile de réveiller le peuple, mais quand sa colère est déchaînée, il est plus difficile encore d’en paralyser les effets.

Honneur donc à l’homme qui s’arme le premier pour en soulever des milliers, il nous fait faire un pas à l’escalade du Ciel, il est plus fort que Dieu ! — Honneur à la femme qui lève le premier pavé, à l’enfant qui pousse le premier cri de détresse dans une grande ville. Honneur à ceux qui déposent, dans un plateau de la balance sociale, épée pour épée !

Oh ! ne flétrissons pas les rares fleurons qui brillent encore à la couronne de la France révolutionnaire ; n’allons pas chercher à de nobles actes des motifs que les plus vils rougiraient d’avouer. Lorsque, le 12 juin 1849, M. Ledru-Rollin s’écria, du haut de la tribune nationale, que la Constitution serait défendue, même par les armes, ce fut bien le cri de son âme indignée. N’avait-il pas entendu, lui aussi, le râle de Rome ? Ne savait-il pas qui commettait cet assassinat ? Ne se fût-il pas rendu complice, par son silence, des hypocrites joies du jésuitisme ? Avait-il donc moins de cœur que tant d’autres qui se levèrent le lendemain ?

Ce défi fut spontané, il fut vrai, il eut la puissance et la portée d’une révolution, l’Europe le