Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/460

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vers les bals et les amours banales, soûlant des filles de nuit pour acheter le droit de danser avec elles, et les attirant dans leurs chambres à la lueur d’un écu. Tout le long des murs, c’étaient de sales orgies et des chants lubriques qui célébraient la Chaumière et le Prado. Les patrouilles grises ramassaient chaque soir des écoliers avinés.

« Le vieux roi Louis-Philippe était le plus complaisant des tentateurs. Il sourit en voyant que les hymnes de Liberté étaient oubliées dans les Écoles, et se frotta les mains. Il les fit 271 poursuivre par le ridicule d’abord, ensuite par la correctionnelle, plus tard par les tribunaux supérieurs. Les applaudissements étaient pour les refrains grossiers, on les transmettait de bouche en bouche, on les imprimait, on passait les soirées d’hiver à les apprendre. On étudiait le cancan ; les vieux étudiants gagnaient leur vie à l’enseigner aux nouveaux. Le gourdin des assommeurs et les procès tombaient comme grêle sur ceux qui répétaient une strophe de la Marseillaise, innocente chanson ! Les étudiants se faisaient gloire de rechercher l’impopularité ; ils affichaient des allures de clercs de notaire et de nobles ruinés. Si encore ils s’étaient amusés…

« Quand éclatèrent les journées de Février que nous célébrons aujourd’hui, les Écoles restèrent muettes ; le réveil du peuple leur fit peur. Quelques-uns seulement furent vus dans la mêlée ; leurs chemises étaient tachées de sang. Il n’en fut point fait mention dans le compte-rendu du lendemain.