Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/489

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parti, faire nombre dans les majorités, mentir dans les journaux, fouetter la Colère lascive, caresser l’Intrigue à la peau gluante, rendre hommage à la Partialité borgne. Je méprise ces ambitieux transis qui tendent les deux mains à l’ouvrier, se coiffent, s’habillent comme lui, et se croient obligés de parler le mauvais langage des halles. Qu’on se souvienne donc, avant tout, que le peuple n’aime pas les sourires forcés, qu’il ne les demande pas, mais au contraire qu’on les lui demande avec ses votes. Encore une fois, il n’est pas de comédiens plus gauches ni de courtisans plus vils que ceux qui lissent le poil des multitudes.

Je suis moi, libre, indépendant, HOMME, dans le sens le plus étendu et contradictoirement le plus individuel du mot. Je me crois différent de tous les autres, et je ne me compare à eux ni pour convoiter leur supériorité ni pour humilier leur infériorité 290 relatives. — Toi qui m’as fait l’âme rebelle, ange ou démon, merci !… Jamais je n’ai sali mes lèvres à la table des tribuns ou des princes de la terre, jamais mon amitié confiante ne rechercha leur orgueil !…

Qui suis-je ? — Anglais, Espagnol, Belge, Suisse, Américain ?… Cela est bon sur les passeports, et il n’est pas de naturalisation de contrebande que je ne me sois libéralement octroyée. — Français ?… Il fut un temps où j’aurais adressé des odes à la colonne Vendôme et des ballades aux rives de la Seine avec autant de ferveur que le