Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/493

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hypocrite, inqualifiée, inqualifiable, déclassée, désespérante, la misère bien élevée, la plus atroce de toutes les misères !… La misère du pion !!![1]. —

Partout il est des jeunes gens dont les autres s’isolent parce que la société les rejette, parce qu’ils ne sont pas reçus et qu’ils ne s’assujétissent pas aux manières du monde. Ils ont l’échine raide et les angles aigus ; leur aspect est sombre ; ils s’irritent du bourdonnement de la conversation. Ils aiment les pensées et les habits larges ; leur tête est mauvaise et leur position pire. Ils se permettent de mettre en doute l’infaillibilité du pape, le droit divin, la légitimité de la propriété, la félicité de la famille et l’harmonie de l’ordre civilisé. — Je suis de ces jeunes gens-là.

Partout il est des jeunes gens dont les anges de la terre détournent leurs regards qui guérissent de tous les maux. Je le jure sur ma vie, celui-là peut tout souffrir dont l’extérieur remplit d’effroi les jeunes filles gracieuses et que jamais elles ne consolèrent par une bonne parole. — Oh ! femmes, femmes ! chaque soir vous bénissez vos mères qui vous ont donné des yeux limpides ; et de l’homme qui vous aimerait le mieux, vous ne voulez voir que l’habit. — Je suis encore de ces jeunes gens-là.

Eh bien ! je supporterai mon isolement. Pour en sortir, je ne comprimerai pas mes poumons

  1. Expression dont les collégiens se servent pour désigner le maître d’études.