Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome II.djvu/270

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le Nord de la Péninsule, entre Saint-Jean-de-Luz et San-Sebastian, quelques maisons blanches sont posées sur la croupe d’un grand rocher dont la face intrépide regarde l’Océan et tient tête à sa rage.

Dans le courant des siècles ce rempart naturel a faibli ; la mer mugissante, avide de liberté, l’a troué des mille pointes de ses lames errantes. Et par la brèche ouverte, comme par une fenêtre, elle a lorgné la terre, l’a trouvée de son goût, s’est avancée, s’est étendue sur les plaines, agrandissant chaque jour sa porte d’entrée, formant un lac d’azur au devant du village qui sourit au soleil. — On appelle ce lieu Los Passages.


Là le grand Atlantique caresse tendrement aujourd’hui la blessure qu’il a faite en un jour de fureur. Là les vagues redisent leurs éternelles plaintes au rocher qui les écoute avec sa complaisance éternelle. Là l’hirondelle blanche jette son cri perçant qui fait venir l’orage. Là les fraîchissantes brises, les nuages des cieux, les refrains monotones du matelot vous plongent dans des rêves sans fin. Là n’abordent jamais les hommes des villes que si leurs navires sont en détresse. Et dans la baie tranquille ils trouvent un refuge contre la tourmente, un beau sol oublié par la nature au milieu de la Civilisation.


Quand j’y passai, c’était de grand matin, et je chantais comme un pinson. Je m’étais surpris à