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XI

Dans ce siècle de matérialisme décent, où les tyrannies les plus inglorieuses et les modes les plus gênantes ont force de loi grâce à l’apathie générale, il est des habits qu’on ne peut 173 porter et des sentiments qu’il serait ridicule de faire connaître quand on a le malheur de les avoir conçus.

Qu’un homme pose en tribun dans l’enceinte d’une assemblée ; cela se voit tous les jours, c’est original mais parlementaire. Qu’il acquière de l’influence sur la place publique, on le tolère encore ; c’est même une position redoutable qui donne droit aux hommages d’une bourgeoisie peureuse. À ces rôles l’ambition trouve son compte ; on traîne un parti derrière soi, tôt ou tard de pareils dévouements obtiennent leur récompense.

Qu’on s’inscrive pour l’émancipation du sexe faible, c’est galant et bien porté ; les preux phalanstériens sont gens du monde, et Dieu merci ! il est encore de fort jolies femmes qui savent être reconnaissantes. Qu’on s’intéresse au sort des enfants, l’on peut invoquer le patronage de Saint Vincent-de-Paule qui les recueillit, de M. Dupin qui fit réduire leurs heures de travail et de M. Carnot à qui l’on supposa toujours des intentions très libérales pour la réforme de l’instruction publique.

Mais que l’on fasse appel à la sentimentalité des hommes en faveur des bêtes les plus grosses et les plus sauvages, qu’on ait de la sympathie