Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome II.djvu/350

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Portez-nous dans vos fêtes, admirez-nous un instant seulement. Car nous naissons par milliers sous les pas des hommes, et les pleurs de la nuit nous reproduisent en bien plus grand nombre qu’on ne saurait nous détruire.

215 « Les fleurs ne mentent jamais ; dès qu’elles changent de couleur, elles ont cessé de vivre.


« Aimez-nous, disent les jeunes filles. Nous sommes ravissantes, et la reine des haies, la rose églantine, n’est pas plus parfumée que nos cheveux. Quand nous avons quinze ans, nous ne savons plus que devenir sous les jupons de nos mères ; il nous faut des amants qui promènent nos grâces dans les pays lointains. Toute mort nous paraîtrait effrayante qui ne nous prendrait pas dans les transports d’amour !

« Le monde nous défend de parler, mais nous savons faire jaser les fleurs. Nous effeuillons la marguerite et la marguerite répond toujours selon nos désirs. Nous promettons beaucoup d’amour à qui sait nous comprendre. Nous portons des bouquets de pervenches et d’œillets rouges ; l’œillet rouge signifie passion, et la pervenche espoir : ne les laissez pas flétrir !

« Les fleurs ne mentent jamais ; dès qu’elles changent de couleur, elles ont cessé de vivre.


« Dans la saison bénie du printemps, quand l’amour fait frissonner la terre, les ruisseaux, le brin d’herbe, les branches embaumées du peuplier