Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome II.djvu/377

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fait plus de tort par quelques-uns de ses discours que par tous ses actes. Dis peu de mots, réussis dans tes entreprises, parviens à ton but et fixe-le toujours. Le négociant américain recommande à son fils : fais de l’argent n’importe comment, n’importe avec quoi. Toi, vis et meurs libre à quelque prix 233 que ce soit, sur quelque terre que tu te trouves. Et passe à travers les hommes de lettres et de politique comme, parmi les guêpes bourdonnantes, un cheval au galop. »


IX


— Belle, trois fois belle, dis-moi, je t’en supplie : que deviendra l’Europe ?

— « Une nappe de sang !

» La verge d’aconit a porté ses fleurs et ses fruits. Les vents ont dispersé les douces fleurs, les baies vénéneuses sont restées sur la tige et la chaleur du jour les a mûries. Vois ! la Guerre assemble ces verges en faisceau ; de sa main de fer elle frappe sur les peuples et les pousse devant elle, comme le balayeur, la poussière du chemin.

» Le froment a porté ses graines d’or. Aussitôt est venu le moissonneur ; il a mis l’acier tranchant près des racines, il a lié ses gerbes, et sur son aire a tout étalé, tout battu. Il faut que les récoltes soient rentrées ; elles se perdraient dans les champs. Vois ! les hommes sont serrés en bataillons épais ; dans les plaines sanglantes le boulet