Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome II.djvu/401

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ainsi toujours. Non certes ; et très grande était-elle quand les flammes de ses vaisseaux disaient au loin son 250 nom ; quand l’Afrique, les Indes et les deux Amériques tremblaient au seul bruit de ses rames ; quand elle avait pour capitaines Albuquerque, Cabral et Vasco de Gama ; quand elle avait pour barde le très grand Camoëns, alcyon qui s’épuisa pour la chanter !

— Leçon bien propre à rabaisser l’orgueil des puissances terrestres, si rien pouvait guérir leur incurable mal ! Elles se disent grandes, elles disposent du sort des nations secondaires avec une majesté vraiment bouffonne. Puis survient un héros de Huns ou de Cosaques, ou bien un marchand de coton qui dit : je m’appelle lion ou vautour : qu’on me paie le tribut de gloire et de richesses que Dieu réserve à ses élus ! Car dans ces sortes de rapines, Dieu, le bon Dieu, le Dieu juste et puissant, le Dieu des guerres et des congrès tient toujours la folle balance que fait pencher le sang dont les épées dégouttent !

Il est une fable que les pasteurs des hommes apprennent à leurs petits dès que ceux-ci font leurs dents et leurs griffes, c’est celle du loup recouvert de l’habit du berger. Et cependant les peuples-troupeaux tressaillent d’allégresse toutes fois qu’une de ces fauves bondit de volupté. —


… Laissez-vous conduire par moi bien loin du temps présent ; supposez, ô lecteur, que vingt-cinq ans ont passé depuis que la propriété n’est plus