Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome II.djvu/418

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De leur côté, les agriculteurs entrent dans la plaine sur laquelle ils veulent répandre le double bienfait de la fraîcheur et de la fécondité.

Jusqu’alors il n’y est venu que des ronces rampantes dont les bergers cueillaient dédaigneusement les fruits, que des herbes jaunes et dures, que des touffes de genêts et de bruyères dans lesquelles vivait tranquille tout un peuple de lapins, fléau de la contrée.

261 Le plan des opérations est tracé d’avance. On amène les buffles acclimatés en Europe, les forts taureaux élevés sur les bords de l’Èbre et de la Guadiana. Ils sont attelés, dix par dix, à des charrues ornées de tous les attributs de l’agriculture. La légion travailleuse se divise en autant de troupes qu’il y a d’attelages, et chacune dans sa direction trace un sillon profond et large comme un ruisseau.

En même temps les clairons se dispersent par la campagne ; ils sonnent des marches vives et se répondent à de grandes distances.

Les fouets sifflent et claquent ; les taureaux mugissent, bondissent, se jettent çà et là en écarts furieux. Mais ils sont conduits par des guides habiles, et devant les socs tranchants le sol est enlevé comme une arène légère.

Quand la plaine est ainsi creusée, les hommes et les attelages se rassemblent au centre sur un rappel des clairons. Puis l’orchestre imite le bruit des eaux jaillissantes, on lève les digues qui s’op-