Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome II.djvu/73

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est inconnu. Comment avancer dans la foule sans combats, sans blessures ? Et cependant comment l’homme réussirait-il à se passer de tout ce qui l’entoure, à dépeupler l’univers ? Et s’il y parvenait, quelle figure ferait-il, le pauvre, sous la sombre couronne du Néant ?

J’estime que le Suicide et la Mort sont des fins de non-recevoir, des préparatifs de voyage, du provisoire, des déménagements, des déballages, des passe-temps, des distractions émouvantes, mais non pas des garanties de bonheur. L’un et l’autre semblent nous faire reculer devant une solution remise à jamais, mais il n’en faut pas moins sauter, courir toujours, et toujours avancer en tournant. Où qu’il promène ses passions et l’importance de sa personne, l’être est condamné à vivre à perpétuité ; la Révolution n’abdique jamais les droits qu’elle a sur lui.

31 Si c’est là du Désespoir, comment y échapperais-je, moi qui prends conscience chaque jour de mes existences passées et de mes existences futures ?


À l’impatience de mon caractère qui m’entraîne vers l’Infini, à la Liberté de mon intuition qui m’emporte vers l’Éternel, j’opposerai la notion de la Fatalité qui me domine de toutes parts. La compression est en raison directe de l’émancipation. Nous en sommes encore à l’homéopathie sociale. Donc mal contre mal : chacun se sauve comme il peut !