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Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/202

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versant des Alpes les plus hautes ; des bords du Léman aux rivages de Sicile les peuples saluaient la croix de ses bannières ; il avait contraint l’Europe à lui reconnaître le titre de roi gagné dans les batailles !

Ses ancêtres avaient vu le jour sur le faîte des Alpes ; ils en étaient descendus comme l’aigle, roi des cieux. Et maintenant leur puissance était aussi solidement établie que les Alpes inébranlables. Voilà ce que voulut exprimer le roi Victor-Amédée II en élevant cette basilique et en la nommant Supergà.

Le site est bien choisi. Sur le pied des montagnes l’Éridan s’enroule comme un ruban vert. Dans leurs cimes touffues passent le souffle des matins, l’haleine des soirs, la brise et la tourmente. Le pavillon des cieux se plaît à protéger le dôme qu’éleva si pieusement la main des hommes ; le soleil et la lune l’éclairent comme deux lampes ardentes, la voûte d’un tombeau ; les étoiles qui filent répandent sur la terre consacrée les parfums éclos dans les régions sublimes.

De leurs couches de pierre les rois sardes peuvent contempler les Alpes, leur berceau ; les riches plaines de la Lombardie ; le dôme de Milan, objet de leurs convoitises caressées ; le Piémont fertile, subjugué par leurs armes ; la grande cité bâtie par leurs soins.

Ah ! je rougis de l’imbécillité de mon espèce. Et je me demande s’il n’est point de puissance, s’il n’est point de terreur capables de guérir les rois