Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/241

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nage point. — Subis l’exil véritable, l’exil parmi les hommes. — Marche dans la droiture de ton chemin, attentif à la voix de ton cœur. — Erre par le monde, change souvent de pays ; cela te fera croire au ciel et prendre courage jusqu’au jour de la délivrance. — Efforce-toi de pleurer et de rire de temps à autre pour ne pas étouffer. — Entends parler les hommes, réponds-leur, écris pour eux. — Sens-toi vivre, si tu le peux ; ne te laisse pas aller encore aux séductions d’outre-tombe ; ne cueille pas trop souvent des fleurs dans les campos santos. Ta présence parmi les hommes nous est nécessaire pour quelque temps encore. »


… Et ces paroles dites, Hennequin disparut, me laissant plus résigné, plus dispos au travail. Dès lors je résolus d’accepter le voisinage de la famille et de la société, de me laisser composer sur la terre une existence telle quelle, de bâiller tous les matins en m’éveillant, de manger deux fois le jour, de prendre mon courage à deux mains, de me divertir tous les soirs par mesure hygiénique. Si je me résigne à persister dans cette voie, je suis de force, dans six semaines, à parler du siège de Sébastopol et de la crise ministérielle piémontaise avec autant d’impertinence que MM. de la littérature au jour le jour.