Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/35

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peut-être la solitude complète, les époux Cœurderoy se fixèrent au voisinage de Chêne, dans le tranquille hameau de Fossaz. Car, d’après M. Dupleix, Jannot était pour ainsi dire la seule personne que fréquentait Cœurderoy. Il vivait tranquillement, sortait peu, travaillait (écrivait) toujours ; sa femme faisait de la peinture.

Je n’ai aucune raison de diminuer l’importance du fait que fin septembre dernier, quand j’ai pu parler, à Fossaz et à Genève, à trois témoins locaux de sa vie d’alors, une dame de la famille de l’ancienne propriétaire de la maison m’a dit qu’on s’était aperçu, au bout de quelque temps, que Cœurderoy ne jouissait pas de la plénitude de sa raison ; que sa femme cachait la chose, en lui cédant en tout, mais que cela était devenu patent pour chacun. M. Dupleix, qui l’avait appelé « fou », m’a dit, lorsque je lui ai demandé s’il pouvait me donner des preuves à l’appui de cette qualification, que, dans diverses conversations qu’il avait eues avec lui, cette « folie » ne s’était pas montrée. Cœurderoy lui-même a décrit ce qu’il ressentait dans ses accès de maladie, avec une sincérité parfaite. Il a nettement déclaré sa détermination d’avoir recours au suicide, si la folie était inévitable (v. t. III, pp. 33, 35, 48). — Je présume donc qu’il passa les années qui suivirent 1855 dans un état de dépression croissante, de mélancolie et de désespoir que rien