Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/367

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qu’une teinte de deuil, une teinte grise ; on pressent, à les voir, qu’il s’y commet de lents assassinats. La police pudibonde les relègue dans les quartiers les plus misérables, près des prisons, des hôpitaux et des fosses communes auxquels elles fournissent incessamment leur contingent de malheureux.

Exploiteurs et parasites, puisqu’il vous faut vivre de la mort de l’homme, faites promptement du moins ! Fondez le plomb en balles, injectez du mercure dans ses veines, forcez-le de boire des vins chargés de litharge et de lécher le vert-de-gris de vos 500 vieux sous. Il n’aura pas à souffrir ainsi des lentes et atroces maladies que les ouvriers contractent dans les fabriques meurtrières ; il connaîtra son affaire, il sera tué sur l’heure ; les douleurs de l’agonie lui seront épargnées !

Dans leurs conversations avec les peintres qui viennent argenter leurs châteaux, les gens du monde ont entendu nommer la colique métallique, mais ils ne savent pas quelles souffrances elle déchaîne dans l’organisation, et de quel prix est payé leur luxe par certaines classes de travailleurs. Je vais le leur dire afin qu’ils n’en ignorent :


La plupart des ouvriers qui préparent le blanc de plomb sont détruits en quelques années ; ceux qui travaillent l’étamage des glaces succombent plus vite encore ; quant à ceux des usines de cuivre, ils souffrent plus cruellement que tous les autres.