Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/461

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fixes ou mobiles, coureurs du fisc et des gabelles, tireurs de corde, démons de potence, mouchards et douaniers, gueux des montagnes, gueux des salons et gueux des plaines. Tout est lancé !

Tayaut ! Tayaut ! L’empereur chasse.

Sur les hauteurs et dans les fonds, à travers blés et vignes, par les hameaux et les taillis, les prés et les jardins tout roule et se précipite. Adieu haies et clôtures ! Adieu moissons et vendanges ! Tout est rentré. — Paye, paysan ! —

Tayaut ! Tayaut ! L’empereur chasse.

Tout est bon : épis et raisins, taureaux et génisses, sangliers et tonquins, sous et écus, anguilles et jeunes filles, fine toile et gentil vin. Ils s’attablent dans la maison, caressent la femme et la chambrière, battent le grain et les gens, enfoncent les tonneaux, les portes et autre chose. Ta fille est belle, manant, porte-la sous les draps des coureurs d’aventures ; ton fils est fort, 561 envoie-le sous Sébastopol, aux démêlés des rois. — Paye paysan, l’impôt de l’avoir, l’impôt de l’honneur et l’impôt du sang. Tu veux un empereur : ergô pour les frais du culte, s’il te plaît !

Tayaut ! Tayaut ! L’Empereur chasse.

Par les villes et les champs, aux frontières et sur les flots tous fuient, tous s’échappent devant la meute altérée ; tous montrent aux chasseurs l’envers de leur cœur. Philosophes et représentants, médecins et notaires, ouvriers et laboureurs, enfants, femmes et vieillards, tous détalent, tous prennent leurs jambes à leur cou. — Tayaut ! Tayaut !