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dant que la cendre soit dispersée par le vent. »



HENRI HEINE EN 1851
(Litho de la collection de l’auteur)

Ce n’était pas qu’il n’eût le désir, le désir ardent, de croire ; mais cet analyste féroce pouvait-il se contenter de la foi du charbonnier ? Un seul Dieu trouvait grâce devant lui et c’était le Christ.

« C’est le Dieu que j’aime le plus », confiait-il à une femme qui essayait de le ramener à des sentiments meilleurs à l’égard de la religion. Et il donnait de sa préférence ces raisons :

«  Ce n’est point, disait-il, toujours sur le ton ironique, parce qu’il est un Dieu légitime dont le père était déjà Dieu et gouverne le monde depuis un temps immémorial, mais parce que, bien qu’il soit né Dauphin du Ciel, il a des tendances démocratiques et n’aime pas le faste courtisanesque ; et puis parce qu’il n’est pas le Dieu d’une aristocratie de pharisiens doctrinaires, ni de lansquenets galonnés, mais bien un modeste Dieu du peuple, un bon Dieu citoyen. En vérité, si le Christ n’était pas encore Dieu, je donnerais ma voix pour qu’il le fût, et bien plus volontiers qu’à un Dieu absolu et imposé, je lui obéirais à lui, le Dieu élu, le Dieu de mon choix. »

Le grand ironiste avait une excuse à son scepticisme irrévérencieux : lui que le Destin avait condamné à ne pouvoir ni vivre ni mourir.

Vivre dans la mort, quel supplice plus horrible ;