Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/80

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écolier, bizarre, gauche, aux yeux bleus et durs, orphelin, sans amis, il était misérablement entretenu par la charité d’un oncle. Refusé à un examen pour son ignorance en logique, il se présentait une seconde fois, sans avoir daigné lire la logique. Il fut reçu, mais avec quelle pitié dédaigneuse ! Son orgueil en conçut un ressentiment qui ne se calmera plus. Cet orgueil, en toutes circonstances, se manifestera : c’est la pierre de touche de son caractère.

Quand, simple et obscur journaliste, il reçoit du premier ministre un billet de banque à la suite de ses premiers articles, il répond à cette offre qu’il juge insultante, en renvoyant le présent et en exigeant des excuses — qu’il obtint, d’ailleurs.

Plus tard il se donnera l’amer plaisir de se montrer implacable en toutes circonstances. Il ne tolérait de personne qu’on lui manquât, traitant avec arrogance les plus hauts dignitaires.

Le secrétaire d’État l’avisant que le duc de Buckingham désirait le connaître, il répond que « cela ne se peut, qu’il n’a pas fait assez d’avances ». Le duc de Shrewsbury lui faisant observer que lord Buckingham n’avait pas l’habitude de prendre les devants, Swift réplique qu’il attend toujours les avances « en proportion de la qualité des gens, et plus de la part d’un duc que de la part d’un autre homme ».