Page:Cadiot - Elisabeth Verdier.pdf/20

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doute elle reconnaissait ce choc, et n’en augurait rien que d’irritant.

— Entrez, dit-elle.

La femme de charge reparut. Elle avait remplacé sa cornette par un bonnet à coques de satin jaune, sa robe fanée par une robe neuve en mérinos marron, son tablier de cotonnade par un large tablier de soie noire. Ainsi parée, et le front surmonté de son tour aussi neuf que sa robe, madame Monique faisait vraiment une femme de charge accomplie. Pour sa figure, nous n’en dirons rien, hormis qu’elle était laide. Madame Monique avait le visage carré, la taille carrée, l’envergure carrée. Elle paraissait solidement attachée au sol par des jambes et des pieds taillés en force. Au reste, sa physionomie exprimait moins la méchanceté que le dépit de porter un joug odieux, et dans le regard dont elle contemplait sa jeune maîtresse, il y avait plutôt de l’indignation que de l’hostilité.

Pour voiler ce regard, elle baissa hypocritement les yeux en demandant :

— Nous avons à dîner monseigneur l’archevêque, le général de division et monsieur le préfet. Qui mettrai-je à la droite de madame ?

Élisabeth se recueillit un instant :

— Mettez monseigneur à ma droite, dit-elle.

Puis, comme se parlant à elle-même, madame Verdier murmura :

— Le délégué du pouvoir divin doit passer avant ceux des pouvoirs de la terre…

— Feu madame, répondit de nouveau la femme de charge, donnait la place au général. Après cela, rien n’empêchait le général de la céder à monseigneur.

Élisabeth Verdier ne passait pas pour dévote, il s’en