Page:Cadiot - Minuit.pdf/130

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Il rêve des millions, il éprouve une soif inextinguible de richesses et de jouissances.

Quand il arriva à la pension bourgeoise, ii trouva la maison, si triste d’ordinaire, pleine de bruit et tout en liesse. Le potage était servi, les hors-d’œuvre délicats se rangeaient autour de la table, et des fumets inaccoutumés arrivaient de la cuisine, où fricotait un marmiton venu de chez Chevet. Buneaud courait comme un effaré de la cuisine à la cave et de la cave à la salle à manger. Les vieilles gens semblaient se regaillardir, et les jeunes votaient au bienfaiteur la plus bruyante des ovations. Quelques étudiants, en voyant si grande chère, avaient été chercher leurs maîtresses pour les faire participer à ce régal sous des prétextes plus ou moins bien trouvés, et ces dames entouraient le vieux teneur de livres de leurs plus séduisantes coquetteries.

Naigeot s’épanouissait au bonheur et se livrait tout entier aux délices de la table, à la joie communicative et bruyante, et aux caresses de ces folles enfants du plaisir qui lui faisaient enfin oublier les grâces majestueuses de madame Gobain. Il vivait comme jamais il n’avait vécu. Son sang courait chaud dans ses veines, et battait dans l’artère avec une rapidité de cent pulsations par minute. On eût dit, que son corps était de moitié dans le rajeunissement de son esprit, tant il semblait plus vert et plus puissant ; quelle eau de Jouvence que le bonheur et l’espoir !