Page:Cadiot - Minuit.pdf/26

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— Ah ! vraiment, belle dame, je crois que ma poésie répond à celle de M. de Voltaire, et je demande grâce pour la rime.

— En faveur de la raison ?

— Non ; en faveur de l’improvisation.

— Eh bien ! votre improvisation n’a ni rime ni raison, voilà tout !

— Belle dame, digne fille des Muses, votre réflexion n’est pas assez aimable pour sortir d’une jolie bouche, et pas assez charitable pour une âme chrétienne, — car vous êtes chrétienne, et vous avez une âme, vous !… une âme immortelle, encore ! bien du plaisir ! Quant à moi, une chose me console de vos sermons, c’est que je ne suis pas doué des mêmes avantages ; lorsque le mal qui me tourmente m’aura emporté, je dormirai au moins tranquille, et n’aurai plus de discussions, à soutenir contre les dévots.

La colère commençait à gagner les deux champions.

— Pour moi, répliquait madame P***, je subis les injures des athées dans l’espoir qu’elles me compteront comme autant d’années de purgatoire…

— Oui, oui, c’est cela, chère voisine ; dites tout de suite que pour avoir fait votre partie avec moi vous irez au paradis tout droit. Je ne sais si vous avez lu Rabelais, mais il me semble que vous feriez mieux de me dire franchement comme Panurge à frère Jean :