Page:Cadiot - Minuit.pdf/289

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vant quand je buvais… Je l’ai vu hors de lui, furieux, terrible comme un échappé de l’enfer et se multipliant mille fois, quand je me débattais en brisant les glaces… j’ai poussé des cris horribles… Vanvré est sur la voie, Vanvré soupçonne et jette partout le soupçon…

Madame Manoquet arrosa d’eau fraîche les tempes de son mari, l’aida à se déshabiller, lui fit prendre une potion calmante et s’assit près de son lit, en proie à d’indicibles terreurs. Chaque pas qu’elle entendait frapper les pavés de la rue lui semblait annoncer l’arrivée de la justice désabusée. Elle passa la nuit à poser des sinapismes aux pieds et des compresses glacées sur la tête du malade.

Enfin, vers le matin, il parut plus tranquille.

— Écoutez, lui dit-elle ; il faut nous sauver tous et nous sommes au bord de l’abime… — Vous ne pouvez plus cacher votre état ; il faut laisser croire à la folie mais en cacher atout prix la cause.

Maintenant, il n’y a plus à hésiter, il faut donner notre fille à Vanvré avec les Barbettes pour dot. Voici pour lui un invitation à dîner ; il faut qu’il l’ait ce matin même pour arrêter sa langue maudite.

— Mais…

— C’est notre seul espoir de salut. Si l’on vous interroge sur votre fureur d’hier, — et l’on vous interrogera, mon Dieu ! rien ne peut empêcher cela ! — avouez que les glaces vous font horreur parce que depuis quelque temps vous y voyez un spectre… celui de… votre père,