Page:Cadiot - Minuit.pdf/38

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avec des sanglots, ne blasphémez pas Dieu et ne maudissez pas votre fils ! Hélas ! si Fritz était un killecroff, Hermann mon fils en serait donc un, lui aussi, car dans toute la contrée, il est seul capable de tenir tête à Fritz sous Ile rapport de la brutalité et de la gloutonnerie ! Mais chacun sait que ces killecroffs, ou enfants changés, sont des rejetons du diable, nés des filles possédées, et introduits par ses suppôts dans les familles, à la place des enfants véritables. — Or, dites-moi, qu’avons-nous fait, vous et moi, pauvres veuves dont les maris sont en Terre-Sainte à combattre les infidèles, pour voir nos fils changés par le diable ou les siens ?

Margareth soupira.

— Ah ! ma chère Barbel, jamais peut-être il n’y a eu tant de killecroffs en Allemagne qu’à présent ! — Souvenez-vous de celui de D*** qui mangeait autant que deux manouvriers, criait et battait les voisins tout le jour, et ne savait rire que s’il arrivait un malheur dans la maison !

— Et de celui de K*** près d’Halberstadt, Margareth, qui dès sa naissance ne laissait pas une goutte de lait à sa mère pour son jumeau et tarissait encore cinq nourrices ! Mais, grâce à Dieu, de celui-ci on en fut bientôt débarrassé, car son père ayant pris les bons conseils de ses amis et de ses parents, l’emporta à Halberstadt pour le vouer à la benoîte vierge Marie. Et, comme il passait sur un pont, les diables se mirent à danser sur l’eau et à appeler l’enfant : « Killecroff ! Killecroff ! » L’enfant