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ma belle folie, de mon illusion rapide… Une soirée, c’est peu de chose dans la vie…, et pourtant on peut y faire tenir bien du bonheur. »

Elle se rapprocha de moi, me prit les deux mains et resta debout sans rien dire, en m’enveloppant d’un regard profond. J’entendis les battements de son cœur.

— « Ah ! reprit-elle d’une voix émue, si le plus beau rêve du monde pouvait devenir une réalité !… que de joies infinies pour moi… et pour toi aussi… — Mais non ! me bercer d’un tel espoir serait insensé… Contentons-nous d’un jour…, d’une rencontre rapide…, d’un souper d’écoliers en vacances !… Oh ! ne me le gâte pas ? »

Je ne trouvais rien à répondre, mais je pressais ses mains et je les embrassais, tandis qu’elle semblait me dompter du regard. J’étais heureux comme jamais je ne l’avais été, et pourtant mon cœur se serrait. Il me semblait deviner que cette femme échappait pour quelques instants seulement à une vie douloureuse. Deux larmes me vinrent aux yeux et roulèrent sur ses mains. Elle m’embrassa de nouveau au front.

— « Tu es bon, » dit-elle.

Cette simple phrase triompha des rêves exaltés de mon imagination : je baissai la tête et devins son esclave.

La porte s’ouvrit, et le garçon entra avec un plateau.