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je ne veux pas te blesser. Il y a moyen de nous accorder. Et puisque tu refuses d’accepter mon souper, paye ta part ! partageons les frais… »

Je fouillai mon gousset, comptant bien, naïf que j’étais alors, que ma bienheureuse pièce de cinq francs suffirait au delà.

— « Mais, reprit-elle, fais attention !… alors nous serons quitte à quitte…, tandis que…, si tu ne tenais à ce petit point d’honneur, moi…, qui sait ?… j’irais peut-être un jour te demander à déjeuner… »

À mon tour je me pris à rire.

— « Eh bien ! m’écriai-je, c’est affaire conclue… Tu viendras…, tu viendras chez moi…, ma belle créancière ! »

Toute vanité m’avait abandonné ; j’étais ivre d’espérance. En un instant les rêves les plus séduisants traversèrent mon esprit. Nous nous sauvâmes jusqu’à sa voiture. Je la suivais sans rien dire, tremblant et ravi.

— « Viens, dit-elle, je vais te reconduire. »

Je montai lestement et me blottis près d’elle, sans penser à autre chose qu’à tenir sa taille dans mon bras pendant une demi-heure…

— « Eh bien ! où allons-nous ?

— « Rue des Grès, 27. »

Les chevaux partirent au galop.

— « Que cette voiture va vite ! m’écriai-je.

— « Oui…, les heures heureuses s’enfuient