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du mécontentement et de la gêne ; et si ce fat eût été très beau, sa colère de femme outragée par un grossier hommage n’en eût été probablement que plus grande.

Mille fois il était arrivé à la belle comtesse de sentir près d’elle, au milieu d’un bal, une admiration aussi vive et plus discrète ; jamais elle n’avait été émue ; jamais elle n’y avait pensé un instant de trop.

D’où vient donc qu’elle se troubla ? L’heure critique de sa destinée avait-elle sonné ? ou bien l’influence physique des choses est-elle donc si forte qu’elle puisse modifier, tout à coup, le caractère et la nature d’une femme comme Mme de Morelay ?

Jamais la comtesse n’avait éprouvé cette étrange émotion. Elle baissait les yeux tandis que son mari lui montrait les échappées de vue de la promenade sur la mer, et la lune, éclatante dans son disque d’argent, qui dominait les côtes de Lerici. Elle baissait les yeux et ne répondait pas, de peur, en regardant autour d’elle, d’y revoir cet inconnu, et, en parlant, de trahir son agitation par le tremblement de sa voix.

D’ailleurs, que lui importaient maintenant ces spectacles extérieurs, dont la magie l’enivrait quelques instants auparavant ? Mme de Morelay regardait au fond de son cœur un spectacle bien plus nouveau : le spectacle de la