Page:Cadiot - Nouvelles.pdf/190

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entendre, en prêtant l’oreille, fait, d’heure en heure, sauter d’énormes quartiers de marbre. Ces quartiers, des hommes adroits et forts les roulent jusqu’à un torrent qui a tracé son lit entre les deux montagnes et descend à la mer, comme tous les torrents qui roulent des Alpes à la Méditerranée. Le lit de ce torrent, c’est le chemin que prend le marbre pour arriver au port. Des bœufs, attelés par troupeaux, remorquent les blocs, et les traînent jusqu’au vais seau où on les embarque. Quelquefois, ces bœufs restent plusieurs jours attelés à un seul morceau de marbre. Lorsqu’un bateau a son chargement, il prend le large et va pourtourner l’Espagne par le détroit de Gibraltar, côtoie le Portugal, traverse le golfe de Gascogne, et gagne le Havre. Là, il entre en Seine, et remonte jusqu’à Paris. Voilà comment vous voyez, de votre balcon, fonctionner la grue qui enlève les blocs sur le pont du bateau et les dépose sur la berge.

— Allons voir Carrare ! s’écria la comtesse de Morelay. J’apprendrai avec plaisir tous les détails de ces travaux ; je veux avoir vu les flancs ouverts de cette montagne, d’où sortent les vierges de nos cathédrales et les Phryné de Pradier…

— Et les baignoires de tous les hôtels d’Italie…, interrompit le comte. Eh ! qu’est-ce donc que la matière sans l’esprit qui l’anime, le génie