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Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 1, 1912.djvu/28

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votre corps. Ceci va voue paraître étrange, mais je suis logique jusqu’au bout. Vous perdrez dans mon estime, si vous vous laissez aller, je vous en préviens. Au contraire, plus vous durerez, plus je vous aimerai ».

Comment ne pas être frappé de l’accent profondément chrétien de cette admirable lettre ? Et quelle merveilleuse trempe d’âme un tel accent révèle ! Comme un tel langage détonne au milieu de notre démocratie jouisseuse, matérialiste et gangrenée jusqu’aux moelles ! C’est le langage d’un homme de l’ancienne France, formé aux plus pures traditions à la fois classiques et chrétiennes, un langage qui sonne le grand siècle, et qui rappelle celui de nos plus grands moralistes, quand la tradition de la sagesse antique, jointe aux vertus surnaturelles du christianisme, composait la substance de l’esprit national. Quelles âmes alors, quels caractères, quelles fortes personnalités ! Aujourd’hui que la démocratie coule à pleins bords, et qu’au nom d’une métaphysique à la fois rationaliste et matérialiste, et d’une sociologie prétentieuse et barbare, elle détruit toutes nos traditions nationales aussi bien classiques que chrétiennes, et que, sous le fatras des morales laïques et des belles tirades sur le progrès et la liberté, on ne découvre rien d’autre que cette maxime sénile d’une bourgeoisie dégénérée et d’un peuple aveuli Courte, mais bonne, — il y a plaisir à dresser, face à cette pourriture, la noble et mâle figure de Proudhon, non le Proudhon officiel et soi-disant démocrate, à qui les parvenus du socialisme osent inaugurer une statue, — insulte telle à sa mémoire qu’on se demande comment cette statue, s’animant soudain comme celle du Commandeur, ne leur a pas jeté à la face le fameux Blagueurs ! — mais le Proudhon véritable, le Proudhon paysan, le Proudhon ouvrier, en qui revivait l’âme de