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Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 1, 1912.djvu/53

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exigeait qu’il mît la main sur Proudhon. Mais son rédacteur a eu la main lourde ; il a publié des énormités ; il a laissé dire, ou il a fait dire à M. Elie Halévy (qui pris part à cette « discussion de philosophes » ) que Renouvier a été « l’héritier direct de Proudhon ». Il faut évidemment avoir été informé du mouvement des idées au xixe siècle dans les sous-sols du Temps pour penser que l’auteur de la Nouvelle Monadologie a recueilli une part quelconque de l’héritage proudhonien. Nous avons encore lu, dans le même Temps, que

Parmi les héritiers de la pensée proudhonienne, il fallait compter des anarchistes comme Bakounine. Elisée Reclus et surtout le Kropotkine de l’Entraide, qui sont, les uns et les autres, proprement des sociologues[1].

Pour Bakounine, ce n’est pas contestable. Ce qu’il y a de sain dans son œuvre ? ce qui n’est pas anarchiste, ce qui tend à l’organisation lui vient en grande partie de Proudhon. Mais Elisée Reclus, mais Kropotkine ? Que viennent faire ces idéologues à côté du grand réaliste ? Cette invention est de M. Bouglé. Le Temps ne nous dit pas qu’il ait nommé les authentiques continuateurs de Proudhon : Pelloutier, Georges Sorel et Edouard Berth.

Enfin, nous avons eu une grande protestation de M. Hubert Lagardelle, protestation directe contre le Cercle Proudhon. Nous n’avons pas le moindre désir d’engager une discussion avec le directeur du Mouvement Socialiste. L’un de nous, qui avait commencé une conversation doctrinale avec l’ancien collaborateur de MM. Sorel et Berth, a décidé de ne pas la poursuivre après avoir vu, dans un journal italien, avec quelle extraordinaire fantaisie M. Lagardette a représenté, dans une entrevue qu’il a accordée à un journaliste romain, les positions de M. Georges Sorel et le mouvement nationaliste. Nous ne reprendrons donc pas ici cette conversation interrompue. Nous nous bornerons à reproduire quelques réflexions de M. Lagardelle qui confirment ce que plusieurs d’entre nous ont écrit sur la décadence de la pensée socialiste.

Nous n’y ajouterons que quelques notes pour rectifier des erreurs de fait. Les quarante pages de Darville, de Galland et de Valois que contient notre premier Cahier répondent, pour nos lecteurs, à toutes tes les questions doctrinales posées par M. Lagardette.


Notre génération, écrit M. Lagardette, a contemplé bien des spectacles et les surprises ne nous ont pas manqué. Nous ne pourrions pourtant pas prévoir qu’un jour les restaurateurs de l’Autorité glorifieraient le négateur de l’État.

Il faut un singulier désordre des esprits pour que les néo-monarchistes en arrivent à revendiquer l’anarchiste Proudhon…

  1. Temps, 25 janvier 1912.