Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 5-6, 1912.djvu/46

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nation les écarts d’imaginations désordonnées qui bouleverseraient les conditions de l’existence (et dans ce sens c’est une toi qui correspond admirablement au classicisme dans l’ordre intellectuel) — et qui, enfin, laisse passer, mais après les avoir éprouvées et trempées, les fortes individualités auxquelles la spécialisation héréditaire ne suffit pas.

Dans ce régime, l’homme appartient à une famille, à une corporation, à une classe. Et c’est là ce qui constitue sa vie profonde et fortement particularisée. Il est sans cesse en rapports avec ses concitoyens des autres classes, des autres corporations, des autres familles, mais il n’a avec eux que des rapports généraux, qui n’intéressent pas vivement sa sensibilité, car tous ses sentiments, toutes ses idées, en ce qui concerne le temporel, sont appelés avec une force extrême par les institutions auxquelles il appartient. Une vie familiale, et surtout une vie corporative très développés, font qu’il ne se passionne que pour cette vie qui alimente son intelligence, sa sensibilité, et remarquons-le bien, c’est de première importance, son instinct de puissance, sa volonté d’élévation.

Car c’est là le merveilleux secret de l’ordre social dans les nations de la chrétienté. Cependant qu’une puissante vie spirituelle règle les pulsations du grand corps social, les passions temporelles, dont on pourrait craindre les déréglementa, sont utilisées pour le maintien de la paix chrétienne et de la paix civique. En premier lieu, c’est l’instinct de puissance, qui, dans une société non organisée, entraîne l’homme à la guerre perpétuelle, et qui, dans notre monde classique l’entraîne au travail et devient un merveilleux instrument de progrès social. Je tiens pour acquis, et pour indiscutable, que l’homme cherche toujours à dépasser son