médie. Quel moment pour un poète du génie le plus heureux et le plus facile, connaissant le monde, et passionné pour la gloire !
D’après les renseignemens, plus ou moins exacts, fournis par son biographe. Calderon a composé : cent vingt comédies ou pièces profanes, quel qu’en soit le dénouement, heureux ou malheureux ; cent actes sacramentels ou autos, pièces allégoriques, avons-nous dit, qui se jouaient dans les grandes fêtes religieuses : deux cents louanges divines ou humaines (loas, espèce de prologues) ; cent intermèdes ; un poème sur l’entrée en Espagne de la reine Marie-Anne d’Autriche ; un poème sur le déluge universel ; un poème sur les quatre fins dernières de l’homme ; un poème en l’honneur de la peinture ; un poème apologétique de la comédie ; et un nombre infini de chansons, de sonnets, de romances, etc., etc. De tous ces ouvrages, il ne reste aujourd’hui que les comédies, au nombre de cent huit, et soixante-douze autos précédés de leurs loas (10).
Lorsque nous publierons un choix des pièces de Cervantes, dont le grand nom peut marquer la première époque d’un théâtre espagnol vraiment national, nous raconterons les commencemens, les progrès, en un mot l’histoire de ce théâtre. De même, en publiant les œuvres choisies de Lope de Vega, nous aurons l’occasion d’examiner la poétique de cette comédie espagnole dont Lope fut le législateur ingénieux en même temps que le glorieux fondateur. Pour aujourd’hui, nous nous occuperons uniquement de Calderon. Et comme des critiques plus habiles et plus éloquens, MM. Schlegel et de Sismondi l’ont déjà considéré dans ses rapports avec la civilisation de l’Espagne au xviiie siècle, nous nous bornerons à l’étudier sous ses aspects les plus généraux, du point de vue de l’art. Nous allons le décomposer, l’analyser, et nous essayerons d’établir au juste sa valeur dans chacune des parties qui constituent le poète dramatique.
Et d’abord, l’invention. — Sans être aussi prodigieuse que celle de Lope, l’invention de Calderon n’est peut-être pas moins remarquable. Il n’a point produit, comme Lope, quinze cents comédies ; mais, à mon avis, il féconde mieux un sujet.