naissance que je viens vous trouver ; je viens seulement, comme vous n’acceptez pas les rendez-vous que je vous donne, vous confier un projet que j’ai formé pour vous.
Et vous, ma reine, vous n’avez pas formé quelque projet pour moi ?
Moi ! dans quel but !
J’aurais voulu que vous perdissiez la raison en ma faveur.
Quel est ce projet, madame ?
Écoutez-moi avec attention.
Parlez, madame.
Doña Violante m’a dit, seigneur don César, que vous étiez l’arbitre de sa destinée. Je me suis laissé attendrir par ses pleurs, par sa sincérité, par son amour ; et je viens vous prier que vous ayez pitié de sa noblesse, de sa renommée, de son honneur. Voyez ce que vous voulez que je lui dise ; mais songez-y : quelle que soit votre réponse, je la considérerai comme une offense : car si c’est non, vous ne voudrez pas ce que je demande, et si c’est oui, vous voudrez ce que je ne désire pas.
Vous demandez de moi, madame, un oui ou un non, en m’avertissant que vous serez blessée de l’un et de l’autre, et mon malheur est tel, que je dois vous blesser doublement par ma réponse. En effet : oui, il est vrai que don César est l’arbitre du sort de doña Violante, et non, il n’est pas vrai que je le sois ; et je reproduis ma réponse en sens contraire, en vous disant : Non, don Félix n’est point l’arbitre de son sort, et oui, c’est moi qui le suis[1].
Je ne vous comprends pas.
Je n’en suis pas étonné.
Parlez plus clairement.
Je ne puis.
Comment ?
- ↑ Le traducteur a conservé à dessein l’équivoque que Calderon a mise volontairement dans cette phrase.