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JOURNÉE I, SCÈNE I.

don lope.

Dans le trouble où j’étais en vous donnant ce couteau je me suis blessé à la main : et maintenant, en le voyant dans votre main à vous, je frémis, je tremble ; car, bien que vous ne me montriez ni inimitié ni colère…

don mendo.

Songez donc que c’est là une folle idée inspirée par le trouble où vous êtes, et que je suis incapable…

voix du dehors.

À la montagne ! à la vallée ! au chemin !

vicente.

Les voici qui approchent.

doña violante.

N’attendez pas plus longtemps, partez ; toute mon âme est émue en voyant le péril qui vous menace.

don lope.

Si je m’éloigne, c’est à cause de la crainte que vous témoignez en ma faveur, et non pour le danger que je cours. (À part.) Ô illusion ! que de choses m’a fait voir un seul instant !

don mendo.

Allons à leur rencontre, afin qu’ils n’avancent pas davantage. (À part.) Ô destin ! que de choses tu m’as rappelées à la mémoire !

doña violante, à part.

Jamais je ne me serais imaginé le crime si aimable… Ô souvenir ! que de choses j’emporte à rêver en moi-même !

Ils sortent.

Scène II.

Une salle du Palais à Saragosse.
Entrent DON GUILLEN et LOPE DE URRÈA, vieillard.
don guillen.

Comme depuis ma première enfance j’ai été l’ami de don Lope, ce serait mal à moi, en voyant votre affliction, de ne pas m’informer si vous avez quelque ordre à me donner ? En quoi pourrais-je vous servir ?

urrèa.

Je vous suis fort reconnaissant de l’intérêt que vous me témoignez. — Combien y a-t-il de temps que vous êtes de retour ?

don guillen.

Je suis arrivé hier en Aragon. Je suis venu de Naples pour suivre ici une certaine prétention.

urrèa.

Pour moi, je voudrais parler au roi aujourd’hui, bien que je n’espère guère ; qu’il m’accorde ce que je désire.

don guillen.

Eh bien ! voici que le roi vient de ce côté.