Page:Calderón - Théâtre, trad. Hinard, tome III.djvu/22

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
12
LOUIS PEREZ DE GALICE.

manuel.

Voire âme paraît forte et courageuse ; qu’elle ne se laisse pas abattre.

une voix, du dehors.

Au pont ! courez au pont ! et il ne pourra vous échapper.

don alonzo.

Hélas ! un plus grand malheur encore me menace. Que faire ? ces hommes, — ces hommes que vous entendez sont ceux qui me poursuivent. Un ami plein de bravoure protégeait ma retraite ; et sans doute, puisqu’ils ont pénétré jusqu’ici, ils l’ont tué.

Entre LOUIS PEREZ.
louis.

En s’emparant du pont ils m’ont coupé le passage, et le ciel même semble se fermer sur moi. Cette sombre retraite sera mon tombeau.

manuel.

Qu’est ceci, Louis Perez ?

louis.

C’est un malheur où je suis tombé pour avoir voulu protéger la fuite d’un ami.

manuel.

Vous êtes avec moi, Louis Perez ; nous mourrons ensemble, et ainsi nous aurons montré jusqu’à la fin le dévouement de la véritable amitié.

don alonzo, se relevant.

Celui qui a commis la faute, et qui est la cause de tout ce qui arrive, mourra avec vous.

louis.

La situation est difficile ; songeons d’abord au plus pressé. Manuel, écoutez ma prière : ne tirez point aujourd’hui l’épée pour moi. Ma vie, je le sais, est sauvée dès que ce bras la défend ; mais il importe à mon honneur que, moi absent, vous vous trouviez dans ma maison, et vous savez combien l’honneur est préférable à la vie.

manuel.

Je n’entends rien, et si l’on vous attaque je mourrai avec vous. Il serait beau à moi, vraiment, de me tenir près de vous l’épée dans le fourreau pendant que vous seriez à vous battre !

juana.

Peut-il exister une femme plus malheureuse ?

une voix, du dehors.

Ils ont passé par ici.

manuel.

Les voilà qui viennent. Mais c’est en vain que nous prétendons