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JOURNÉE II, SCÈNE I.

lumière et ténèbres, et tu excites tout à la fois mon amour et ma crainte.

wolsey, bas, au roi.

Sire, dissimulez.

le roi.

Est-il en mon pouvoir, dans le trouble où je suis ? (À Anne, à demi-voix.) Charmante Anne de Boleyn, levez-vous. Si le ciel a voulu que je vous aie laissée un moment à mes pieds, c’est qu’un trouble inconnu s’était emparé de tout mon être. Mais ce motif ne saurait me justifier ; car ce n’est pas la première fois que je vous vois… Levez-vous donc.

anne.

Si de votre main vous m’aidez à me lever, sire, je puis monter jusqu’au ciel. Mais non, ceux qui sont à vos pieds ont assez d’honneur, et ne doivent pas prétendre à une plus haute sphère. (À part.) Suis-je assez humiliée ?

le roi.

Vous avez autant d’esprit que de beauté.

l’infante.

J’envierais sa faveur, si l’envie pouvait pénétrer jusqu’à moi.

la reine.

Je serais jalouse, si ma tendresse pouvait concevoir de la jalousie.

anne.

Songez-y, de grâce, madame, vous faites injure à ma reconnaissance.

le roi.

Oui, toutes deux peuvent être jalouses, surtout, madame, quand elles voient votre beauté divine.

Il sort.
marguerite.

Anne de Boleyn, vous entrez au palais sous une étoile favorable. Plaise à Dieu — car c’est là l’essentiel, — que vous en sortiez aussi heureusement !



JOURNÉE DEUXIÈME.


Scène I.

Une salle dans le palais.
Entrent LE ROI et WOLSEY.
wolsey.

Calmez-vous, sire.

le roi.

Cela m’est difficile. Celui qui aime d’un fol amour ne trouve de calme que dans sa douleur et de soulagement que dans ses larmes.