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JOURNÉE III, SCÈNE II.

chemin est on ne peut plus agréable, et je veux aller à pied quelques instants.

louis.

Seigneur, je vous baise les mains.

le voyageur.

Soyez le bienvenu, cavalier.

louis.

Où donc va votre grâce, par un soleil si chaud ?

le voyageur.

À Lisbonne.

louis.

Et d’où venez-vous ?

le voyageur.

Ce matin, au point du jour, je suis parti de Salvatierra.

louis.

Je suis heureux de la rencontre, car je désire savoir des nouvelles de ce pays, et je vous serai très-reconnaissant de vouloir bien m’en donner.

le voyageur.

Mon Dieu ! rien qui ait la moindre importance, si ce n’est les gentillesses d’un homme dont toutes les actions seraient, dit-on, le scandale de la contrée. Après avoir un jour blessé le corrégidor, je ne sais plus pourquoi, il est entré hier au soir, à ce que l’on raconte, chez le juge d’information, pour lire le procès fait contre lui.

louis.

C’est être bien curieux !

le voyageur.

Et comme on voulait le prendre, il s’échappa des mains des alguazils avec un autre homme qui est, dit-on, un bandit et un meurtrier comme lui. Mais toute la justice s’est mise en campagne pour les prendre, et, selon les apparences, ils ne pourront échapper. — Voilà les nouvelles.

louis.

Maintenant, seigneur, — comme dans tout ce que vous avez dit vous me paraissez un galant homme, — je voudrais savoir ce que vous feriez si vous aviez un de vos amis dans une situation difficile et qu’il vous suppliât de le sauver ?

le voyageur.

Je me mettrais à son côté, bien résolu à vaincre ou à mourir avec lui.

louis.

Seriez-vous pour cela un bandit ?

le voyageur.

Non, certes.