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JOURNÉE III, SCÈNE IV.

manuel.

Mon bien !

louis.

Ma sœur !

isabelle.

Qu’est ceci ?

louis.

Le monde entier nous poursuit.

manuel.

Il n’y a point de puissance humaine pour lutter contre le destin.

isabelle.

Ne craignez pas le monde entier. Vous, vous avez vos épées ; nous, avec nos mains, nous pourrons faire rouler ces rochers.


Entrent LE JUGE et SA TROUPE.
le juge.

Escaladez ces rochers. Malgré leur insolente audace, il faut que je pose mon pied sur leurs têtes orgueilleuses. Vive Dieu ! pour les exécuter selon leurs mérites, ce pays servira de place publique, et cette montagne d’échafaud. À celui qui me livrera Louis Perez mort ou vif, je promets deux mille écus.

louis.

En vérité, c’est par trop bon marché. Vous m’estimez trop bas ; moi, je vous estime mieux que cela. (À la Troupe.) À celui qui me livrera mort ou vif le seigneur juge, je lui donnerai de ma main quatre mille écus.

le juge.

Tirez, tuez ! qu’ils soient frappés tous deux par la foudre !

On tire un coup d’arquebuse. Louis tombe.
louis.

Dieu me protège ! je suis mort.

le juge.

Rends-toi !

louis.

Moi, me rendre ? non, j’ai mon épée… Mais, hélas ! je ne puis me soutenir. Approchez, venez me prendre.

le juge.

Quoi ! tout mort qu’il est, il résiste encore !

isabelle.

Un moment, de grâce, ne le tuez pas !… ou si votre fureur a soif de son sang, versez aussi le mien.

le juge.

Marchons à Salvatierra. Cette prise me suffit.

manuel, à Juana.

Laisse-moi !

juana.

Quel est donc ton projet ?