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JOURNÉE I, SCÈNE I.

flora.

C’est son altesse qui veut vous parler. Tout à l’heure elle était à écrire, et m’a commandé de vous venir chercher.

fabio.

Son altesse veut me parler, à moi ! Par le ciel, que sera-ce si elle se hasarde à me déclarer son sentiment ?


Entre LA DUCHESSE, une lettre à la main.
la duchesse.

Flora, avez-vous appelé le valet ?

flora.

Le voilà, madame.

la duchesse, à Flora.

Eh bien ! allez m’attendre par là, vous. (Flora sort. À Fabio.) Nous sommes seuls, maintenant.

fabio.

Oui, madame, et vous ne me trouverez pas ingrat. Je voudrais savoir en quoi je puis vous servir, et vous pouvez parler sans crainte, car je suis l’homme du monde le plus complaisant. Vous n’aurez pas grand’peine à obtenir de moi ce que vous désirez.

la duchesse.

Il faut, Fabio, que vous me disiez une chose que je tiens à savoir. Il importe à mon autorité de m’éclaircir sur un doute qui m’est venu.

fabio.

Si je puis vous satisfaire, il n’y aura pas de difficulté ; car si vous avez envie de le savoir, j’ai encore plus envie de le dire.

la duchesse.

Prenez cette chaîne.

fabio.

Avec plaisir certainement ; d’autant qu’elle est à mes yeux du plus grand prix, car elle vient de vous et elle est d’or. Interrogez-moi donc, madame ; je meurs d’envie de parler.

la duchesse.

Quelle est la dame qu’aime Frédéric ?

fabio.

Je suis un bavard bien malheureux, madame ; j’ignore une chose, et c’est justement ce que vous me demandez.

la duchesse.

Quel ennui ! (Haut.) Comment est-il possible que vous ne sachiez pas cela, puisque vous ne quittez jamais votre maître ?

fabio.

Comment voulez-vous que je le sache, lorsqu’il ne le sait pas lui-même ?

la duchesse.

Sa passion ne peut pas être si secrète.