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Page:Calmet - Traité sur les apparitions des esprits, tome 2, 1751.djvu/160

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DISSERTATION SUR LES

vous plûtôt des ſabres des Turcs ? L’avis de cet habile homme ne ſervit de rien : le Vroucolacas ne parut pas plus traitable, & tout le monde étoit dans une étrange conſternation ; on ne ſçavoit plus à quel Saint ſe vouer, lorſque tout d’une voix, comme ſi l’on s’étoit donné le mot, on ſe mit à crier par toute la ville que c’étoit trop attendre ; qu’il falloit brûler le Vroucolacas tout entier ; qu’après cela ils défioient le Diable de revenir s’y nicher ; qu’il valoit mieux recourir à cette extrémité, que de laiſſer déſerter l’Iſle. En effet il y avoit des familles entieres qui plioient bagage, dans le deſſein de ſe retirer à Sira ou à Tine.

On porta donc le Vroucolacas par ordre des Adminiſtrateurs à la pointe de l’Iſle de S. George, où l’on avoit préparé un grand bûcher avec du godron, de peur que le bois, quelque ſec qu’il fût, ne brûlât pas aſſez vite par lui même. Les reſtes de ce malheureux cadavre y furent jettés, & conſumés dans peu de tems : c’étoit le premier jour de Janvier 1701. Nous vîmes ce feu en revenant de Delos : on pouvoit bien l’appeller un vrai feu de joie, puiſqu’on n’entendit plus de plaintes contre le Vroucolacas ; on ſe contenta de dire que le Diable