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primitivement une argile fluide à laquelle se sont mêlées de petites pierres.

Nous passâmes ensuite devant l’embouchure de la Tchékoualé et devant des îles que nos pilotes se rappelaient avoir vues faire partie de la côte. Ces îles, que l’on appelle Makakomo, étaient gouvernées par Kapôpia, chef d’une certaine importance.

Au cap Makouroungoué, le rivage est composé de masses de granit, dont les flancs perpendiculaires ont de soixante-dix à quatre-vingts pieds de hauteur. À l’île de Kohouennga, où nous nous arrêtâmes, d’énormes blocs gisent, çà et là, dans la plus grande confusion.

Notre arrivée jeta l’effroi parmi les indigènes ; les femmes et les enfants se réfugièrent dans la jungle, et les hommes se mirent en état de défense. Chacun d’eux avait à la main un arc et une demi-douzaine de flèches ; il y en avait en outre une vingtaine dans le carquois.

Le mauvais aspect de la matinée suivante retarda notre départ. Vers dix heures, comme on arrimait les bagages, un de mes soldats, en mettant le pied dans le bateau, fit partir son fusil et se blessa. La balle lui entra sous le bras droit et sortit au bas du coin interne de l’omoplate ; il était tellement gras qu’il serait difficile de déterminer la direction que le projectile avait suivie ; mais le poumon n’était pas attaqué.

Après avoir fait deux compresses avec un mouchoir de baliste, je pansai mon homme de manière à l’empêcher de mouvoir le bras, et, bien que l’hémorragie fût considérable, le sang, n’étant pas artériel, s’arrêta facilement. Enfin je donnai au blessé un peu de morphine pour le faire dormir, et je partis rassuré sur son compte ; mais dès que je l’eus quitté, ses camarades lui firent boire de l’eau chaude, pour lui faire rejeter le mauvais sang qu’il avait dans l’estomac, et les efforts qu’il fit pour vomir eurent bientôt ramené l’hémorragie.

Je leur recommandais sans cesse de ne pas avoir leur fusil chargé ; non seulement celui-ci, pauvre fou, n’en avait pas tenu compte, mais il s’était servi de son raïfle comme d’une gaffe, le tenant par la gueule, et l’agrafant au plat-bord avec le chien.

Aucune étoffe d’importation étrangère ne se voit dans le village de Kitata, où nous arrivâmes ensuite ; les habitants sont vêtus de peaux de bêtes, de feutre d’écorce ou de cotonnade de leur propre fabrique. Ils suspendent la draperie qui leur sert de