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saient les autres d’une vingtaine de pieds étaient réunies par un filet à mailles carrées, fait avec des lanières d’écorce. À chaque angle des mailles étaient suspendus des paquets d’épis de sorgho et de maïs. Le grain ne court pas ainsi le risque de s’échauffer, comme il arrive parfois quand il est enfermé avant d’être complètement sec ; mais les oiseaux mettent au pillage ces greniers en plein vent[1].

La couchée du lendemain se fit à Kisimmbika, où nous arrivâmes en suivant la rive droite de la Louama, et après avoir traversé beaucoup de lits de rivières entièrement desséchés. Ces lits étaient ouverts dans une couche très mince de schiste argileux, trouée çà et là par des affleurements d’hématite.

Une partie de l’herbe avait déjà été incendiée ; tout le reste brûlait. Pendant la nuit, le rugissement de ces feux énormes s’entendait à une distance de trois ou quatre milles ; le ciel tout entier était éclairé par les flammes.

De Kisimmbika, la route se continua jusqu’au 17 juin sans longues haltes. Le soir, nous nous arrêtions dans les villages, au grand préjudice des indigènes. Comptant sur leurs fusils, mes compagnons n’approvisionnaient pas leurs bandes ; ils les envoyaient prendre non seulement ce dont elles avaient besoin, mais ils leur faisaient rapporter des vivres pour eux-mêmes.

Les habitants se sauvaient, ou regardaient d’un air sombre ces bandits piller leurs greniers, saisir leurs mortiers, leurs gamelles, leurs meubles pour alimenter le feu où cuisaient les denrées qu’on leur avait prises.

Si parfois ils s’approchaient de nous, c’était pour demander à la caravane de les aider à attaquer leurs voisins.

Je distribuai à mes hommes des rations supplémentaires pour les empêcher de prendre part au pillage ; plusieurs d’entre eux ayant, malgré cela, donné quelque sujet de plainte aux naturels, j’indemnisai ceux-ci et fis châtier sévèrement les coupables, afin de montrer qu’un Anglais n’avait nulle intention de s’ouvrir un chemin par la force, de s’approvisionner par le vol.

Je crains bien cependant que toutes les fois que j’ai eu le dos tourné, mes gens ne se soient pas mieux conduits que les au-

  1. Voyez dans Livingstone, Dernier Journal, la description d’autres greniers en plein vent, et la manière dont l’épi de maïs est accroché, épi de forme curieuse obtenue par sélection, p. 37, vol. II. (Note du traducteur.)