CHAPITRE XX
En choisissant Nyanngoué pour siège d’un établissement fixe au bord du Loualaba, les traitants de Zanzibar ont été bien inspirés. Deux villages, bâtis sur deux éminences de la rive droite, composent la station. Entre les deux collines est une petite vallée qu’arrose un ruisseau marécageux et qui offre d’excellents terrains pour la culture du riz. Par suite de son élévation, l’établissement est préservé de la fièvre, tandis qu’en face, la rive gauche, plate et basse, est inondée par les débordements du fleuve qui laissent derrière eux des eaux stagnantes, foyer de maladies pestilentielles. Nulle part le marécage n’a plus de malignité ; cependant les Vouaghénya habitent ce lieu insalubre sans paraître en souffrir aucunement.
Des deux villages, celui du couchant, quand nous y arrivâmes, était entièrement occupé par des Vouamrima de Bagamoyo et de ses environs. Ces gens avaient pour chef Mouinyi Dagâmmbé, qui, se trouvant là un bien plus grand sire qu’il n’aurait jamais pu l’être dans son pays natal, avait renoncé à toute idée de retour et donné tous ses soins à la création d’un harem. Il y avait réuni trois cents femmes ; et les triste effets de cette réunion, joints à sa passion pour la bière et pour le chanvre, qu’il fumait au lieu de tabac, se manifestaient clairement par sa marche rapide vers l’idiotie.