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Roussoûna. En causant avec le conducteur de cette avant-garde, je m’assurai que Tipo demeurait à côté du Lomâmi, affluent considérable du Loualaba, et que le lac Sânnkorra, vers lequel se dirigeait ce dernier, était à moins de quatorze marches de l’établissement. Des gens de Tipo s’étaient rendus au lac, où ils avaient rencontré des marchands qui étaient venus dans de grandes embarcations.

Tipo-Tipo arriva deux jours après, et vint me faire une visite. C’était un homme de belle mine, le plus soigné dans sa mise que j’aie vu parmi les traitants. Absolument noir, il n’en était pas moins un véritable Omani ; car, chose curieuse, le sang nègre n’avait en rien altéré chez lui ni les idées, ni les manières arabes.

Bien qu’il y eût deux ans et plus qu’il habitât les bords du Lomâmi, il ne s’était pas douté jusque-là du peu de distance qui le séparait de Nyanngoué. Il me dit que, pour atteindre Sânnkorra, le meilleur moyen était de venir à son établissement, d’y prendre des guides et de marcher droit au lac. De petites bandes d’indigènes passaient constamment sur cette route, et il ne pensait pas que le voyage offrît de difficulté.

Deux natifs de la contrée qui est à l’ouest du Lomâmi l’accompagnaient ; ils approuvèrent ce conseil, et me donnèrent quelques renseignements sur un lac du nom d’Iki, lac que traverse le Louhouemmbi, affluent du Lomâmi, et qui est probablement le lac Lincoln de Livingstone.

Tipo eut bien vite réglé l’affaire pour laquelle il était venu ; il lui suffit pour cela de déclarer que si l’on attaquait de nouveau Roussoûna, il le défendrait. Sa caravane, et les bandes des cinq ou six traitants qui le reconnaissaient pour chef, comptaient en effet plus de fusils que n’en possédaient tous les gens de Nyanngoué. Il était probable, en outre, que les marchands établis dans l’Ouroua se mettraient avec Tipo, ce dernier étant fils de l’un des hommes les plus riches et les plus puissants de Zanzibar, lui-même ayant à la fois beaucoup de fortune et d’influence. On promit donc à Nyanngoué de laisser Roussoûna tranquille.

L’affaire étant conclue, je fis mes adieux à Dagammbé ; et le 26 août, je m’occupai de faire passer la rivière à mes gens, afin d’être prêt à partir avec Tipo, qui devait se mettre en route le lendemain matin de bonne heure. Tanganyika me fut d’un grand secours ; mais dans l’après-midi, il eut un violent accès de fièvre,